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Pourquoi Séra’h a reçu une si grande Brakha ?

Par Rav Yéhiel Brand

Question :

Bonjour Rav,

Lorsque Séra’h a chanté à Ya’acov que Yossef est encore en vie, pourquoi a-t-elle eu une si grande bénédiction de Ya’acov ?

Merci

Réponse du Rav :

Lorsque les frères reviennent d’Egypte et annoncent que Yossef était encore en vie, dans un premier temps, Ya’acov ne les croit pas. Le Midrach explique : “Le menteur, même s’il dit la vérité, n’est pas cru”.
En effet, les frères de Yossef avaient déjà trompé leur père avec le vêtement trempé dans le sang (Béréchit Rabba). Cependant, il finit par les croire : “Ils lui rapportèrent toutes les paroles de Joseph, et Jacob vit les charrettes envoyées par Joseph pour le porter, et l’esprit de Jacob revécut”. Le Midrach rapporte que sa petite-fille, Séra’h la fille d’Acher, chanta : “Joseph est encore en vie” ; c’est alors que Ya’acov crut, et il l’a bénie d’une longévité exceptionnelle.
Bien que ce récit ne soit pas précisé dans le verset, il est pourtant allusionné, comme cela sera expliqué plus loin. La Torah cite Séra’h deux fois ; parmi les soixante-dix personnes qui descendent en Egypte (Béréchit 46, 17) et lorsque les juifs sont comptés à la fin des quarante ans dans le désert (Bamidbar 26, 46). Elle était encore vivante à la fin des quarante ans, et, selon le Talmud, elle était encore vivante à l’époque du roi David.
Voici quelques éléments pour comprendre son parcours hors pair.
Zilpa, la servante de Léa, enfanta Acher, et Léa s’exclama alors : “II est né pour mon bonheur ! Oui, les filles m’ont nommée bienheureuse.” (Béréchit 30, 13). Elle prophétisa que les filles de la tribu d’Acher seront les plus “belles” et aptes pour les Cohanim Gdolim (Rachi, Dévarim 33, 24), et qu’une de ses filles, Séra’h, aura un destin des plus heureux.
Entre les enfants de Léa et de Ra’hel, un conflit faisait rage, à savoir de qui viendrait le roi. Pour écarter Yossef de la royauté, les enfants de Léa étaient prêts à verser du sang. Les enfants des servantes, en revanche, s’entendaient bien avec Yossef, et, en gardant les troupeaux, passèrent beaucoup de temps ensemble (Béréchit 37, 2). Ils ne cherchèrent pas sa mort (Rachi, Béréchit 49, 5). Ya’acov, pour sa part, cherchait aussi à réduire l’animosité entre ses enfants (Béréchit 37, 10), et sa femme Léa, quant à elle, ne chercha pas non plus à nuire à Yossef. Bien que ses fils complotassent contre Yossef, Léa et les garçons d’Acher inculquaient à Séra’h d’aimer Yossef.
Lorsque les frères annoncèrent à Ya’acov que Yossef était encore en vie, Ya’acov ne les crut pas, pour la raison évoquée plus haut. Il se peut aussi que les frères n’aient pas convaincu leur père que Yossef était vivant, car, dans leur subconscient, ils ne voulaient pas totalement qu’il revienne et qu’il s’accapare la royauté. En revanche, Séra’h, du fait qu’elle ait voulu de tout cœur que Yossef revienne, a réussi à convaincre Ya’acov. Le patriarche l’a alors bénie d’une longévité extraordinaire, afin de récompenser ce geste convenablement.
En fait, bien que la royauté définitive échoie aux descendants de Léa, à David, mais celle de la descendance de Ra’hel devait la précéder, avec Chaoul, de la tribu de Binyamin. Bien que David soit déjà nommé roi, ce choix n’allait pas de soi pour la tribu de Binyamin. Les guerres au début du règne de David, entre les adeptes de Chaoul, Avner, et ceux de David, le prouvent amplement. De plus, vers la fin de la vie de David, un individu de la descendance de la tribu de Binyamin, Chéva ben Bi’hri, essaya à nouveau de dérober la royauté de David. La majorité du peuple aussi douta de la légitimité de David, et suivra Chéva. David constitua alors une armée et mit à sa tête son fidèle général, Yoav. Ce dernier poursuivit le rebelle, qui se réfugia dans une ville fortifiée. L’armée de David l’encercla, et, soupçonnant ses habitants de faire affaire commune avec Chéva, Yoav se prépara à faire un bain de sang. A ce moment-là, Séra’h, la fille d’Acher, âgée de sept siècles (!), intervint. Elle se présenta à Yoav, et dit : “Anokhi Chéloumé Emouné Israël…” (Samuel II 20, 19).
Cette expression a tout au moins trois sens : 1) J’ai la foi entière dans la paix pour Israël, 2) C’est moi qui ai transmis la paix à Ya’acov , lorsque j’ai chanté que Yossef était encore vivant, et c’est encore moi qui ai transmis le cercueil de Yossef à Moché (Béréchit Rabba 94, 9, rapporté par Rachi dans Samuel), 3) C’est encore moi qui ai transmis la foi à Israël, étant un témoin vivant de toute son histoire, depuis l’époque des Patriarches, en passant par la sortie d’Egypte et jusqu’aux événements du temps de David.
Avec la même voix douce qu’elle avait jadis convaincue Ya’acov, elle a maintenant convaincu Yoav de ne pas utiliser les armes. Puis, elle convainc les habitants de la ville d’éliminer l’individu recherché, ce qu’ils font immédiatement, et la royauté de David fut préservée, sans effusion de sang.
Autant la première fois elle était à la manœuvre pour faire retrouver la royauté à Yossef, malgré que sa famille, les descendants de Léa, David et Chlomo, durent attendre, autant fut-elle de nouveau à la manœuvre sept siècles plus tard, cette fois-ci pour faire retrouver la royauté à David et Chlomo, les gens de sa famille.
L’abnégation de Léa et de Séra’h porta ses fruits, selon la règle transmise par nos sages : “Celui qui se laisse repousser par l’heure (qui cède sa place de chef à un autre, tant que sa propre heure de règne n’est pas encore venue), son heure le rattrapera (deviendra chef lorsque son heure arrivera)” (Brakhot 64a).
Une fois que Ya’acov fut convaincu que Yossef était vivant, il retrouve la joie, et, par conséquent, son Roua’h Hakodech (esprit prophétique). Il bénit Séra’h d’une longévité exceptionnelle, afin qu’elle puisse convaincre Yoav de ne pas verser du sang innocent, et convaincre les habitants de la ville d’aider David de retrouver sa légitimité de roi.
Dans le verset cité : “Ils lui rapportèrent toutes les paroles de Joseph…” (Béréchit 45, 27), nous trouvons désormais l’œuvre de Séra’h, par une interprétation de style “Rémèz” (allusion).
Le mot “Agalot” “charrettes” veut aussi dire “génisses”. Le Tanakh l’utilise parfois pour décrire une femme bien-aimée ; David a appelé sa femme Mikhal “Egla” “génisse”, de même que Chimchon (Sanhédrin 21a).
“Ils lui rapportèrent toutes les paroles de Joseph, et Jacob vit les charrettes (‘Agalot) envoyées par Joseph pour le porter, et l’esprit de Jacob revécut”. “Ils” ce sont les enfants des deux servantes ; “toutes les paroles de Joseph”, ce sont les paroles que Joseph a dites aux enfants des servantes lorsqu’ils étaient ensemble pour garder les troupeaux ; “et Jacob vit les ‘Agalot”, ce sont les œuvres de Léa et Séra’h, qui étaient aimables comme des génisses ; “envoyées par Joseph”, car Yossef a envoyé Séra’h, à travers ses discussions fraternelles avec ses frères ; “pour le porter”, pour raffermir l’esprit de Ya’acov ; “et l’esprit de Jacob revécut”, l’esprit de Ya’acov, qui cherchait toujours l’amitié entre ses enfants, a revécut.
La révolution lâche que fomentait Chéva ben Bi’hri, s’opposa à l’esprit de Ya’acov ; grâce à Séra’h, cette révolution s’estompa, et l’esprit de Ya’acov renaissait de joie. Séra’h, pour sa part, regagnait cette vie, grâce à la bénédiction que Ya’acov lui donna.
Kol Touv.

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